Guillaume NAHON, conservateur général du patrimoine, directeur des Archives de ParisLa Campagne embourgeoisée. L’habitat de plaisance à Charonne, 1650-1850
La Campagne embourgeoisée. L’habitat de plaisance à Charonne, 1650-1850
Comme de nombreuses paroisses de la banlieue, le village du Grand Charonne est un lieu de villégiature prisé des élites parisiennes dès le Moyen Âge. Le phénomène est bien documenté à partir du XVIIe siècle et les sources des XVIIIe et XIXe siècles permettent de le mesurer avec précision. Il atteint son apogée à la fin de l’Ancien Régime. « La situation de ce village sur la pente d’un coteau fait que l’on y voit de jolies maisons de campagne », nous dit Thiéry dans son Guide des amateurs et des étrangers voyageurs à Paris, publié en 1787. On y dénombre alors près d’une trentaine de maisons qui, avec leurs jardins clos, occupent la majeure partie de l’agglomération villageoise. Le plus souvent construites sur des parcelles initialement destinées à l’habitat et à l’exploitation agricoles, elles disparaissent progressivement à partir de la Révolution, à la faveur d’un mouvement que l’on pourrait qualifier de « reconquête horticole ».
Ralph SCHOR, Professeur émérite d’histoire contemporaine à l’Université de Nice – Sophia Antipolis
Le Paris des écrivains américains. 1919-1939. La « génération perdue »
Au lendemain de la Première Guerre mondiale, de nombreux écrivains américains affluèrent à Paris. Parmi ces quelque 200 artistes figuraient des jeunes qui accédèrent ensuite à la notoriété, ainsi Ernest Hemingway, Scott Fitzgerald, Henry Miller, John Dos Passos, Ezra Pound, Anaïs Nin... Ce groupe fut nommé la "génération perdue". Cette perte était subie par les États-Unis que tous critiquaient plus ou moins. Ils reprochaient à leur patrie sa jeunesse vue comme un facteur de superficialité culturelle, son matérialisme, son intolérance synonyme d'ordre moral, son puritanisme, son racisme dans le cas des noirs victimes de la ségrégation.
Tous les écrivains américains se réjouissaient de trouver à Paris les témoignages d'un passé prestigieux, une vie artistique et littéraire intense, une grande liberté en matière d'idées et de mœurs, liberté dont ils jouirent parfois jusqu'à la licence et à d'audacieuses transgressions. Ils entretinrent une très riche vie de relations dans les cafés de Montparnasse, les rues du Quartier latin, les librairies comme Shakespeare and Compagny de Sylvia Beach, les salons tels ceux de Natalie Barney et de Gertrude Stein. Ils trouvèrent à Paris des sources d'inspiration originales, définirent de nouvelles manières d'écrire, prirent conscience de leur identité profonde. Pour chacun l'exil se révéla fondateur.
Hugo REGAZZI, doctorant, université Paris 1, Panthéon-Sorbonne
La justice seigneuriale de l'abbaye Sainte-Geneviève de Paris au tournant du XIVe siècle
De nombreux contentieux surviennent entre les différentes justices en activité à Paris entre la seconde moitié du XIIIe siècle et le début du XIVe siècle. Y cohabitent alors la justice royale avec une multitude de justices seigneuriales et la délimitation territoriale de ces juridictions peut parfois être à l’origine de conflits opposant aussi bien justices seigneuriales entre elles, que justices seigneuriales et justice royale. Ces contentieux peuvent notamment être observés dans un nouveau type de documentation judiciaire apparaissant à la même époque à Paris et destinée à justifier les droits de haute justice détenus par certains seigneurs.
À travers l’exemple du manuscrit 640 de la Bibliothèque Sainte-Geneviève, dit « Livre de justice de l’abbaye Sainte-Geneviève », cette conférence permettra de présenter ce nouveau type de documentation et les enseignements que l’on peut en tirer quant au fonctionnement de la justice seigneuriale d’un grand établissement ecclésiastique parisien au tournant du XIVe siècle.
Emmanuelle RETAILLAUD, professeure d'histoire contemporaine à l'IEP de Lyon, Sciences Po Lyon
La Parisienne, histoire d’un mythe (18e-21e siècle)
Mythe, idéal, cliché, stéréotype ? « La Parisienne » est un peu de tout cela à la fois : son singulier et sa majuscule laissent entendre qu’il ne s’agit pas seulement, à travers elle, des femmes de Paris, mais bien d’une représentation idéalisée et stylisée. Ses racines sont anciennes, sa légende est toujours vivace : tout le monde a sa petite idée de ce qu’est cette Parisienne, toujours mobilisée par la presse de mode ou les guides touristiques. Pourtant, son image a muté au fil du temps et n’a pas toujours été aussi positive qu’on pourrait le croire.
Cette conférence aura pour objet de répondre à des questions simples mais riches d’implications : depuis quand évoque-t-on la Parisienne ? De quoi est-elle le nom ou le symbole ? Pourquoi est-elle consubstantielle au mythe de Paris ? Et pourquoi n’a-t-elle pas de véritable pendant masculin, même si on évoque ici et là le Parisien ? De la Parisienne de Rousseau à celle d’Inès de la Fressange, ce parcours historique est aussi un parcours en images, tant il est vrai qu’autour d’elle s’est élaborée une riche iconographie.
Marie-Françoise LIMON-BONNET, conservateur général du patrimoine, responsable du Minutier central aux Archives nationales
Que sait-on des notaires de Paris et de leurs archives aujourd’hui ? Quelques études de cas appliquées aux
XVIe-XIXe siècle
Le Minutier central des notaires de Paris, équipe responsable des archives produites par les notaires de la capitale – archives qui, pour les plus anciennes, remontent à la fin du XVe siècle - s’efforce d’accumuler les connaissances et les instruments de recherche permettant de mieux entrer dans les actes notariés, notamment depuis plusieurs années, au travers de la Salle des inventaires virtuelle des Archives nationales dont les contenus s’enrichissent régulièrement. En parallèle, Marie-Françoise Limon-Bonnet s’efforce aussi d’accumuler les connaissances sur les notaires eux-mêmes, dans l’idée de livrer un jour un dictionnaire prosopographique. Ce sont les premiers résultats de cette enquête qui seront présentés au travers de quelques études de cas portant sur des individus, des dynasties et des offices notariaux.
Annie POINSOT, archiviste chargée des fonds liés à la nationalité aux Archives nationales (retraitée)
« Nous ne savons même pas de quoi nous devons avoir honte »1 : des Parisiens privés de la nationalité française par le gouvernement de Vichy (1940-1944)
Les retraits de la nationalité opérés par le gouvernement de Vichy entre 1940 et 1944 ont touché 15 154 personnes. Parmi elles, près de 30% résidaient à Paris et 10% y étaient nées. Les Archives nationales conservent leurs dossiers de naturalisation/dénaturalisation. Extrêmement riches d’éléments biographiques, de lettres manuscrites, parfois de photographies, ces dossiers participent à la connaissance des origines, à l’appropriation d’une histoire familiale. C’est d’ailleurs en évoquant quelques-unes des familles parisiennes victimes des retraits de nationalité que l’on prendra la mesure de cette procédure et des traces qu’elle a pu laisser.
1. BB/11/11264 dossier 77517 X 28
Julie CLAUSTRE, maîtresse de conférences HDR en histoire du Moyen Age à l’Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
Notre-Dame de Paris par les textes. Le projet e-NDP Notre-Dame de Paris et son cloître
Depuis l’incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris, le 15 avril 2019, des dizaines de chercheurs se portent au chevet du monument. Dans l’environnement de recherche inédit ainsi constitué, un groupe de conservateurs et d'historiens, baptisé e-NDP et coordonné par Julie Claustre, se consacre depuis le 1er mars 2021 à la documentation textuelle de la cathédrale : tant à ses archives qu'aux livres qui composaient sa bibliothèque.
Il travaille en particulier à mettre à la disposition des chercheurs et du public le texte intégral des décisions du clergé de Notre-Dame aux XIVe -XVe siècle. Ce corpus, conservé dans les registres de décisions capitulaires, est depuis longtemps identifié par les savants comme une mine d’informations sur la cathédrale, mais il n’a jamais fait l’objet ni d’une étude systématique ni d’un projet éditorial. Le groupe e-NDP doit permettre de lever des blocages à des études pluridisciplinaires sur la cathédrale en fournissant le texte des décisions du chapitre sur la période 1326-1504 (26 registres et plus de 14 500 pages). Il mène en même temps des études thématiques dans trois directions : étude de l’espace du cloître près de la cathédrale, étude de la bibliothèque du chapitre, étude de la puissance du chapitre sous ses aspects économiques, politiques et juridiques. C'est l'avancement de ces travaux qui sera ici présenté.
Pascal HENRI-GALLI, actuaire , ancien dirigeant de société financière
La Troisième République sur le vif. Présentation du Journal politique de 1914-1918 d’Henri Galli
Introduction sur le manuscrit d’Henri Galli.
1e partie : Les institutions juridiques et les arcanes du pouvoir en temps de guerre.
2e partie : Les relations conflictuelles ou consensuelles des pouvoirs civils et militaires.
Conclusion : de l’apport sur le vif d’un témoin et acteur, critique et lucide, du drame de la grande guerre.